Le Milien

Le Milien, frère du Fili, décide un beau jour de faire ses Pâques.  Il se rend donc à confesse pour tenter de se mettre en règle avec le ciel.  Il énumère au curé toutes ses fautes, ô combien nombreuses, essentiellement basées sur des possessions plus ou moins mal acquises.  Le prêtre lui déclare qu'il lui faut tout restituer pour être pardonné.  Alors, le Milien, désespéré, quitte le confessionnal en murmurant :
Si fô restituer, dju çeu rûné !1

Il avait le sens des affaires et était capable de vendre n'importe quoi.  Papa, qui était négociant à l'époque, avait obtenu une commande de sel pour la maison de retraite de Villers-devant-Orval.  Milien, l'ayant appris, se présente à la maison de retraite en disant qu'il venait livrer le sel commandé à Cyrille Gillet.  La livraison effectuée, le Milien se fait payer.  Imaginez la tête de notre père quand il s'est présenté à Villers avec la bonne livraison qui, évidemment, lui a été refusée.

Le Milien mélangeait de la sciure de bois au rbulet (le son), aliment pour bétail dont il faisait commerce, d'où un gain supplémentaire très appréciable.  Un soir, faisant ses comptes, installé à sa table, il s'aperçoit que le crucifix accroché au mur d'en face le regarde.  Du coup, il se lève, retourne le crucifix face au mur et murmure entre ses dents : I gna nè inq' du trop touçi.2
Aucun témoin, fut-il de l'au-delà, ne pouvait assister à ses louches tractations.

Il faut toutefois noter qu'à sa mort, Milien pour se faire pardonner tous ses écarts commerciaux et ce, bien qu'il affirmait ne pas être de la calotte, exigea un enterrement à trois chevaux; entendez par là une messe concélébrée par trois prêtres, ce qui était d'un grand chic à cette époque.

1. S'il faut restituer, je suis ruiné.
2. Il y en a un de trop ici.

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