Monsieur Bouché, l'instituteur

L'instituteur, Monsieur Bouché, dit un jour à notre père :
Cyrille, demain, vous apporterez une banse pour venir à l'école.
Grand-mère Gillet, s'imaginant que le maître d'école souhaitait avoir une banse pour rentrer son bois de chauffage, remet donc à papa le panier d'osier tressé en écorce de noisetier.   Notre père se présente en classe avec l'objet demandé par le magister.
Mettez-le là, près du poêle, lui ordonne l'instituteur.   Bon, maintenant, installez-vous là-dedans.
Et notre père passa toute la journée bien au chaud dans sa banse, près du poêle.  L'histoire ne donne pas les raisons de cette correction originale, mais toujours est-il que Grand-Mère qui n'avait pas un caractère des plus facile, le retira sur le champ de l'école communale de Les Bulles et l'envoya continuer son apprentissage scolaire au village voisin de Prouvy et ce, jusqu'au remplacement de Monsieur Bouché.

Oncle Armand était très en colère contre le maître d'école.  En effet, celui-ci lui avait refusé de rentrer à la maison pendant la récréation afin d'y aller chercher une tartine qu'il y avait oubliée le matin.  À la sortie de l'école, la colère d'Armand est toujours aussi vive.  En voyant la boîte aux lettres postale fixée à un mur du bâtiment scolaire, il assène d'un ton rageur :
Dju kasserâ ta poss', peuqu' !1

Monsieur Bouché, en plus de son originalité, était ce qu'on appelle un homme assez bien portant, même plutôt obèse.  Quand il avait terminé de distribuer le travail à tous ses élèves, il avait l'habitude de se laisser lourdement tomber sur sa chaise et y piquer un bon somme.  Il ne se réveillait que lorsque ses ronflements et les mouvements saccadés de son énorme ventre faisaient s'entrechoquer dans la poche de son gilet sa montre et ses clefs, ce qui provoquait une espèce de sonnerie.
Un jour, le Donné plante entre les mailles de son fauteuil en osier une plume sergent-major, pointe en l'air, bien entendu.  Quand le père Bouché se fut affalé comme d'habitude dans son fauteuil, inutile de préciser qu'il s'est relevé tout aussi brusquement en hurlant, la plume plantée dans son énorme fessier.

1. Je casserai ta poste, puisque ...

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