Frère Remi

Un des oncles de notre père était moine à Maredsous, sous le nom de frère Remi.  Une fois par an, l'oncle Julien, car tel était son nom dans le monde, revenait au pays pour rendre visite à toute la parenté.  Il logeait chez grand-père Polyte, se faisant inviter chaque soir, chez l'un ou l'autre parent.  Un soir, il se rend à Termes chez son cousin le Lestin, pour y souper.  Le lendemain matin, grand-mère lui demande des nouvelles de sa soirée.
Et l'oncle Julien de répondre :
Bonnes gens, bonnes gens, deux sortes de viande !
Que nous étions loin de l'ascèse monacale !

Frère Remi ou oncle Julien, comme il vous plaira, lorsqu'il était en villégiature à Les Bulles, ne se levait pas très tôt, sans doute pour rompre avec l'horaire assez strict de son abbaye.  Grand-mère croyait que notre cousin ecclésiastique, avant de descendre, faisait ses oraisons ou ses méditations.  Mais un jour, notre père intrigué et vaguement méfiant quant à la piété du frère Remi, regarde par le trou de la serrure et constate que le saint homme n'est pas agenouillé en prières comme toute la famille le supposait, mais bien assis devant le lavabo où étaient installés maints flacons de parfum et autres onguents.  Avant d'affronter la vie civile, oncle Julien voulait sans doute un certain décorum qu'il pensait trouver en se parfumant abondamment, parfum qui n'avait guère de rapport avec la classique "odeur de sainteté".

© 1999-2010 - Rémy et Jean-Claude GILLET - Tous droits réservés